Keysight Technologies dévoile sa vision pour la 6G en 2025 (2e partie)
Roger Nichols, directeur du programme 6G de l’Américain Keysight Technologies, partage ses prévisions pour l’année 2025 en matière de 6G. Ce deuxième article répertorie les technologies « habilitantes » de cette technologie, qui ne devraient pas être commercialisées en 2025.
Article adapté par Cédric Lardière
Dans cette seconde partie, on s’intéresse aux technologies « habilitantes » de la technologie 6G, qui, même si elles sont suivies de près par les experts du secteur, ne devraient toutefois pas être commercialisées en 2025, parce que ces technologies « habilitantes » se heurtent à des obstacles d’ordres technologiques ou économiques.
- Les ondes millimétriques
La gamme de fréquences 2 (FR2), telle qu’elle est désignée par la 3GPP, est déjà utilisée dans le cadre de la 5G, mais le secteur a eu du mal à en assurer la rentabilité. Cette technologie reste en effet coûteuse, et il n’y a pas d’application phare pour stimuler son utilisation, et, donc, réduire son coût grâce à des économies d’échelle. Les normes et l’implémentation doivent également être améliorées pour accroître la fiabilité des liaisons radio, en particulier, la gestion « intelligente » des faisceaux.
Elle est similaire à celle de la technologie MIMO (Multiple-Input, Multiple-Output) en ce sens qu’elle repose sur des informations précises en temps réel sur l’état du canal et peut aussi bénéficier de l’apprentissage automatique (machine learning ou ML). Toutefois, la demande de capacité et de spectre est importante et les fréquences libérées dans la gamme 7-17 GHz ne seront pas suffisantes. C’est pourquoi la gamme FR2, dont une grande partie est allouée mais encore sous-utilisée, peut être un élément nécessaire à cet égard.
- Les réseaux terrestres et non terrestres intégrés
Les réseaux sans fil terrestres et non terrestres (NTN) ont bonne presse, notamment, grâce aux satellites et aux plates-formes de haute altitude (High-Altitude Platform Stations ou HAPS ; ballons, avions stratosphériques suborbitaux…). Le but de ces technologies est d’améliorer la couverture et la fiabilité des réseaux, en particulier en cas de catastrophe naturelle ou de secours maritime.
Elles représentent toutefois plusieurs défis : des distances entre émission et réception de centaines de kilomètres (et non de centaines de mètres) ; la gestion du trafic de données entre plusieurs réseaux disparates ; la gestion des interférences compte tenu de la dimension ajoutée à la direction de transmission – pratiquement aucune antenne cellulaire n’oriente les signaux vers le haut ou vers le bas, et tous les modèles de canaux radio normalisés ne sont que bidimensionnels.
- La détection et communication intégrées (Integrated Sensing and Communications ou ISAC)
La possibilité d’utiliser les signaux de communication pour détecter l’environnement suscite également un vif intérêt. La gestion du trafic, des drones, des foules et une myriade d’autres applications sont à l’étude. Les défis sont liés à la fréquence radio, à la longueur d’onde, à la largeur de bande du signal, ou encore à la gestion de la capacité. Les trois premiers paramètres ont une relation directe avec la précision physique et temporelle de la détection. La mise en réserve de ressources radio spécifiquement pour la détection signifie qu’elles ne peuvent pas être utilisées pour les communications. Les signaux idoines pour les communications ne le sont toutefois pas nécessairement pour la détection.
De plus, si la détection et les communications peuvent être effectuées avec le même signal, il n’est pas garanti que la direction souhaitée pour la détection soit la même que la direction dans laquelle le système doit transmettre le signal radio nécessaire. Le travail technique consiste donc à jongler avec ces multiples défis, en plus d’aborder les complexités de l’interférence dans la détection à partir de plusieurs stations de base et d’appareils mobiles. Les modèles commerciaux ne sont pas clairement définis, si bien que l’utilité finale de cette technologie reste à démontrer. Enfin, les sujets intéressent particulièrement les chercheurs, mais leurs possibilités de commercialisation sont encore plus floues.
- Les surfaces « intelligentes » réfléchissantes (Reconfigurable Intelligent Surfaces ou RIS)
Les propagations à l’intérieur et de l’extérieur vers l’intérieur sont problématiques dans de nombreux systèmes radio. Par exemple, les parkings, les grands bâtiments commerciaux, les centres commerciaux et les stades couverts sont desservis par des systèmes d’antennes distribuées et des répéteurs radio (parfois, même, par des stations de base indépendantes supplémentaires). La théorie repose sur l’idée que des approches moins coûteuses, mettant en œuvre de grandes « surfaces » murales, qui utilisent une réflexion « intelligente », pourraient améliorer considérablement la réception à l’intérieur. Elles seraient suffisamment « intelligentes » pour s’adapter à des conditions changeantes (personnes, changements de mobilier, déplacement de machines intérieures…). Tout l’enjeu consiste à les rendre peu coûteuses, fiables et flexibles, ainsi qu’à en améliorer les performances. Il reste encore beaucoup de travail, en particulier pour les rendre abordables.
- La technologie subTHz (fréquences supérieures à 100 GHz)
L’attrait des très grandes largeurs de bande disponibles aux fréquences supérieures à 100 GHz a été tempéré par l’absence de succès commercial des bandes FR2 plus modestes décrites précédemment. Cette situation est exacerbée par le fait que le subTHz est encore plus cher et plus difficile à gérer que la bande 24-71 GHz. La recherche reste importante dans le secteur et dans les universités, mais le subTHz n’est plus envisagé comme une technologie d’accès radio pour la 6G. Cela dit, il existe des démonstrations importantes et réussies de liaisons « micro-ondes » point-à-point utilisant la bande D (110-170 GHz).
La demande importante de capacité de transmission de données pourrait inciter à investir davantage dans ces fréquences de plus en plus élevées, dans ce domaine et dans d’autres applications de niche. Comme prévu, les technologies à l’étude sont, notamment, les semi-conducteurs, les antennes, la gestion des faisceaux, le traitement numérique du signal à grande vitesse et, même, le duplex intégral dans la bande (doublement du débit de données par émetteur et récepteur en même temps). Et, comme pour tout, elles sont soumises à des contraintes économiques.